Les différentes formes de jardins pour cultiver la ville
Les crises économiques, sociales et environnementales conduisent de plus en plus de citadins à vouloir cultiver leur quartier, leur trottoir ou leur balcon. De nombreuses initiatives éclosent ainsi un peu partout dans les villes, et avec elles de nouvelles formes de jardins.
Nous vous proposons un panorama de ces divers types d’espaces cultivés afin de vous aider à orienter votre choix d’intégrer un collectif de jardiniers, de guider vos ballades ou simplement d’en savoir un peu plus sur ce sujet très actuel.
Jardins ouvriers ou familiaux
Jardins partagés
Jardins pédagogiques
Jardins thérapeutiques
Jardins d’insertion
Jardins ouvriers/jardins familiaux
Principalement implantés dans des régions très industrialisées, les jardins ouvriers ont été créés en Allemagne puis développés en France à la fin du 19ème siècle par des industriels et des religieux dans le but de « détourner les ouvriers des bistrots et des syndicats ».
Quelle que soit l’intention de leurs créateurs, les jardins ouvriers ont procuré d’importantes ressources alimentaires à nombre de familles ouvrières.
A l’issue de la deuxième guerre mondiale, ils sont rebaptisés jardins familiaux. Cette nouvelle appellation leur permet d’attirer un public plus large.
Bien qu’ils conservent leur fonction première -l’alimentation- les jardins familiaux présentent désormais beaucoup d’autres intérêts pour les jardiniers, qui les considèrent notamment comme des lieux de convivialité, de protection de l’environnement, de transmission de pratiques culturales ou d’exercice d’une activité physique.
Les jardins familiaux sont des espaces à caractère agricole, divisés en parcelles individuelles de tailles diverses selon les sites. Les parcelles sont attribuées à des particuliers afin qu’ils y cultivent pour leurs propres besoins et ceux de leur famille. Leur production ne peut être commercialisée. Ils sont généralement équipés d’un abri de jardin individuel et clôturés.
La plupart de ces jardins est gérée et animée par une association qui en devient le gestionnaire et interlocuteur.
Les terrains sont mis à disposition par leur propriétaire, généralement les collectivités (municipalités, conseils départementaux), plus rarement des entreprises ou des particuliers. Cette mise à disposition est formalisée par une convention d’une durée limitée, variable d’un site à l’autre, qui fixe les responsabilités de chacun -propriétaire, gestionnaire, jardiniers. Ce contrat peut prévoir des conditions particulières comme l’obligation d’habiter la ville où est implanté le site de jardins par exemple.
Bien que certains sites soient contraints de céder à la pression foncière, les jardins familiaux sont les jardins urbains les plus pérennes. Ils sont en effet pour beaucoup protégés par le code rural.
D’après diverses études, un potager de 200 m2 cultivé selon les principes de permaculture, peut fournir une famille en légumes pendant toute l’année et représente une économie de 1 500 euros par an sur le budget alimentaire familial.
Ces chiffres contribuent certainement à l’engouement des citadins pour les jardins familiaux.
Jardins partagés
Dans les années 70, les new-yorkais ont commencé à transformer les terrains vagues et les délaissés urbains en jardins. C’est avec ce mouvement, appelé « guérilla verte », que sont nés les jardins communautaires.
Ils apparaissent en France à la fin des années 90, avec le même esprit de partage, de besoin de végétaliser et de réappropriation de l’espace public par les citadins, et fleurissent spontanément au gré des opportunités offertes par les friches urbaines.
Les jardins partagés se définissent comme « des jardins créés ou animés collectivement, ayant pour objet de développer des liens sociaux de proximité par le biais d’activités socioculturelles et étant accessibles au public ».
Ils naissent ainsi à partir de la volonté d’un groupe de voisins, qui en assurent l’entretien et l’animation.
Ce sont des espaces de proximité, de petite surface, qui s’adaptent à la typologie du lieu. Leur aménagement (bacs, pots, pleine terre, etc) et leur esthétique sont à l’image du collectif qui l’habite. Cultivés collectivement, leur production est partagée par l’ensemble des jardiniers.
Leur fonction première est sociale : le jardin partagé est avant tout un lieu de convivialité, de mixité et de solidarité. Diverses animations y sont ainsi proposées au public.
Ils n’en demeurent pas moins des lieux de sensibilisation à l’environnement et à l’alimentation.
Ce sont des lieux éphémères, dépendants des aménagements urbains et programmes immobiliers.
Jardins pédagogiques
Les jardins pédagogiques remontent au 18ème siècle. Mais il faut attendre le début du 20ème siècle et la pédagogie Montessori pour voir apparaître en France les premiers jardins pédagogiques en milieu scolaire.
Leurs qualités éducatives ayant largement fait leur preuve auprès des enseignants et des enfants, les jardins pédagogiques se sont récemment développés au sein des établissements scolaires.
Ils sont en effet un extraordinaire support d’apprentissage interdisciplinaire : éducation à l’environnement, à la biodiversité, à la nutrition, sont autant de thèmes que le jardinage permet d’aborder.
Des jardins pédagogiques sont également accueillis au sein de jardins familiaux ou partagés où une parcelle peut leur être dédiée.
Cette formule permet de développer les liens intergénérationnels et la transmission de savoirs. Pendant les vacances scolaires, les jardiniers du site se proposent volontiers pour arroser et entretenir le jardin, avantage non négligeable qui permet à l’enseignant de retrouver un jardin satisfaisant et propre à la poursuite de ses activités de jardinage.
Ces jardins s’inscrivent dans le projet pédagogique de l’établissement et requièrent l’implication durable des enseignants.
Jardins thérapeutiques
Au début du 19ème siècle, le jardinage est introduit dans des hôpitaux psychiatriques américains comme activité thérapeutique. L’hortithérapie était née.
De multiples études ont en effet démontré les vertus du jardinage sur les malades atteints de troubles psychiques tels que la dépression ou l’autisme.
Ces types de jardins ont récemment été introduits en France.
Aujourd’hui, de plus en plus d’établissements spécialisés –unités de vie Alzheimer, ehpad, maisons de retraite- créent des jardins thérapeutiques adaptés à la pathologie des patients qu’ils accueillent.
Les résultats satisfaisants observés sur les patients jardiniers justifient le développement de tels espaces, et prouvent les effets bénéfiques du végétal et du jardinage sur l’équilibre et l’épanouissement de l’homme.
Jardins d’insertion
Les premiers jardins d’insertion apparaissent dans les années 90, avec la montée du chômage et des exclusions sociales. Ils ont en effet pour objectif d’accompagner la réinsertion de personnes désocialisées et très éloignées de l’emploi.
Deux types de jardins d’insertion coexistent ainsi, en fonction de la problématique de leurs bénéficiaires :
Les jardins d’insertion sociale, destinés à remobiliser un public en difficulté par des ateliers de jardinage permettant de renouer des liens sociaux, de rompre avec l’isolement et de reprendre confiance en soi
Les jardins d’insertion par l’activité économique, destinés à salarier et former des personnes afin de les accompagner vers l’emploi. Véritables exploitations agricoles fonctionnant comme des chantiers d’insertion, leurs productions sont commercialisées ou données à des associations telles que les Restaurants du Coeur.
A travers ces diverses formes de jardins, l’activité potagère démontre ses multiples fonctionnalités et fait la preuve de son intérêt pour l’homme et son environnement.
Face à l’urbanisation galopante, de nouveaux types de jardins s’inventent, visant à maintenir un lien des citadins avec la nature et trouver des alternatives pour les nourrir : cultures sur les toits ou en pied d’immeuble, Incroyables comestibles ou Permis de végétaliser, les initiatives sont nombreuses et créatives, et n’ont pas fini de nous séduire.